Bukavu : Entre espoir et désillusion ( Edito! )

Ceux qui croient encore que Bukavu changera un jour savent lire entre les lignes. Mais que découvrent-ils réellement ? Un espoir fragile, souvent balayé par la réalité brutale d’une ville où le chaos semble s’installer comme une seconde nature.
Alors que le pays traverse une période douloureuse, certains y voient une opportunité, non pas de solidarité, mais d’enrichissement personnel. Tandis que des familles endeuillées peinent à trouver de quoi subsister, d’autres reçoivent des sacs de haricots, de farine de manioc et de l’huile d’arachide… des denrées qui, en vérité, proviennent des pillages.
Les scènes de chaos se sont multipliées. Boutiques saccagées, magasins dévalisés, entrepôts vidés sans vergogne. Loin d’être un simple vol, ces actes ont semé la peur au sein d’une population déjà fragilisée, contrainte d’assister impuissante à l’effondrement de l’ordre social.
Dans ce tumulte, des jeunes errants ont aggravé la situation, diffusant des rumeurs alarmantes : « Le M23/AFC est aux portes de la ville ! » Une annonce qui n’avait d’autre but que d’accentuer la panique et de faciliter de nouveaux pillages.
Une famille de Bukavu, prise dans ce tourbillon de désolation, a pu mesurer l’ampleur du désastre après la mise à sac d’un entrepôt. Ce qu’elle y a trouvé n’était pas qu’un lieu vide, mais le symbole d’une ville à bout de souffle, où la peur et l’anarchie semblent désormais dicter leur loi.
Jusqu’à quand Bukavu restera-t-elle prisonnière de ses démons ?
La question n’est pas nouvelle. Elle hante les esprits à chaque nouvelle crise, à chaque flambée de violence, à chaque promesse non tenue. Bukavu, ville au passé glorieux, semble aujourd’hui piégée dans une spirale infernale où l’espoir se consume à petit feu. Mais cette fatalité est-elle inévitable ?
Non. Car l’avenir d’une ville ne repose pas uniquement sur ses dirigeants, aussi défaillants soient-ils. Il appartient à ses citoyens. Bukavu ne changera pas tant que l’indignation restera passive, tant que les actes de vandalisme seront excusés par la misère, tant que l’impunité sera la norme. La transformation viendra lorsque ses habitants décideront, collectivement, que la peur et le chaos ne sont plus une fatalité.
Cela demande du courage, une vision et une unité qui transcendent les clivages. Cela exige une jeunesse qui refuse de se laisser instrumentaliser par des intérêts obscurs. Cela nécessite des institutions qui restaurent l’ordre et la justice, sans favoritisme ni complaisance.
Bukavu peut renaître. Mais pour cela, il faut que ceux qui la portent dans leur cœur cessent de simplement espérer et commencent à agir.
Pascal Mushiarhamina