Politique

RDC/ F. Tshisekedi : « l’AFC c’est lui (Joseph Kabila) … Et après ?(Tribune)

Depuis le 6 août dernier, le président de la RDC a lancé une déclaration fracassante en désignant sans détour son prédécesseur comme étant l’instigateur de l’Alliance Fleuve Congo (AFC), un mouvement insurrectionnel dirigé par Corneille Nangaa et la façade politique du mouvement rebelle M23 soutenu par le Rwanda.

Cela fait donc deux semaines que l’homme le mieux informé de la République a fait cette annonce qui a bouleversé la scène politique, mais depuis, rien ne semble avoir bougé de part et d’autre.

Du côté du FCC, la plateforme politique de Joseph Kabila, les propos du chef de l’État ont été qualifiés d’absurdes et mensongers, allant jusqu’à évoquer les effets du traitement que Félix Tshisekedi aurait subi à Bruxelles. Du côté du pouvoir, cette déclaration n’a pas entraîné d’action contre l’homme de Kingakati. L’opinion publique s’attendait à voir des mouvements des forces de l’ordre dans les différentes résidences de l’ancien chef de l’État à la recherche de preuves pouvant constituer des éléments pour une poursuite judiciaire.

Si ces accusations de Félix Tshisekedi devaient mener à une procédure pénale contre Kabila pour instigation de mouvement insurrectionnel et atteinte à la sécurité de l’État, les charges pourraient entraîner une condamnation à la peine de mort. Autant dire que cette interview de Tshisekedi pourrait avoir des conséquences lourdes pour l’avenir politique de la RDC, qui verrait là un feuilleton inattendu de son histoire. Mais jusqu’à présent, rien ne bouge, sauf cette menace à peine voilée d’une instruction donnée au ministre de la Justice et Garde des Sceaux lui demandant d’ouvrir les placards où se trouveraient les vieux dossiers du régime précédent.

Pourquoi cette manœuvre détournée au moment où l’annonce du président devrait être suivie d’actions judiciaires réelles ? Sans actions, la parole du chef de l’État risque de perdre en crédibilité. Elle pourrait aussi donner un argument supplémentaire à ses opposants : « Le Président de la République aurait-il menti ? » Une affirmation grave et extrêmement malvenue en ce moment où tout chancelle au pays. Au moment où des frustrations énormes fissurent sa majorité, où le social est en péril et où l’espoir suscité par sa réélection s’effrite peu à peu.

De toute façon, Joseph Kabila, par son silence légendaire, a raté l’occasion offerte par son successeur de placer un mot… Oui, son silence est sa force, ce qui donne de la valeur à sa parole, mais face à d’aussi graves accusations, on peut dire de lui que « Qui ne dit mot consent ! » Ignorer ainsi l’occasion de se défendre peut laisser croire à une part de vérité dans les propos de Félix Tshisekedi, « le Congolais le mieux renseigné de la République ».

Toutes les péripéties qui ont conduit à la création de l’AFC ramènent à Joseph Kabila, que ce soit les partenaires de Nangaa ou son discours, on ne peut s’empêcher de regarder du côté de Kingakati. Si l’on ajoute à cela son absence prolongée du pays, on est tous d’accord que, pour une fois, on aurait tous voulu l’entendre dire quelque chose.

Mais l’homme à la barbe broussailleuse et à la discipline militaire préfère garder son mutisme légendaire et nous frapper de « 12 », comme aiment le dire les Kinois, c’est-à-dire d’une indifférence sans pareille. C’est comme si, ayant consulté sa boule de cristal, les génies et esprits lui avaient révélé que rien ne lui arrivera !

Cette situation ne fait qu’alimenter les rumeurs, selon lesquelles un rapprochement aurait été établi entre les deux hommes d’État lors du récent sommet de la SADC à Harare et que les deux parties auraient fumé le calumet de la paix. Cependant, il n’en demeure pas moins que la parole d’un président de la République, homme-institution, a valeur de loi et que ce qu’il dit ne peut être pris à la légère. Nous attendons avec impatience la suite de ce feuilleton.

Par Botamba Sésé Séko

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